Cet ouvrage reprend l'analyse des neuf romans qualifies jusqu'à présent de « réalistes » et définit une esthétique s'épanouissant de la fin du XIIe siècle jusqu'au début du XIVe. À cette période en effet, la réalité concrète bénéficie d'un statut nouveau et exerce un attrait inhabituel. Nommée « tournant de 1200 » par les historiens, une conjoncture historique et économique favorable, sous-tendue par un contexte philosophique très particulier marqué par la redécouverte des textes d'Aristote et le recul du néoplatonisme chrétien, a donné naissance à ce mouvement littéraire, qui s'apparente sur bien des points à l'art gothique.
Un premier chapitre s'attache donc à identifier et démêler l'enchevêtrement des racines du prétende réalisme médiéval, avant de définir l'art gothique littéraire tel qu'il s'actualise dans tous les genres. Les notions de réalisme, d'ouverture et d'anthropocentrisme s'imposent pour caractériser le regard nouveau posé sur un monde immanent, désormais perçu en lui-même et pour lui-même. Les représentations de l'espace et du temps confirment ce bouleversement des mentalités. Elles trahissent une perception moins théocentrique de l'univers et de la temporalité terrestres. Privilégiant l'individu, la réalité concrète et son déterminisme, les choix énonciatifs, narratifs, descriptifs et dialogiques, tous les modes d'écriture romanesque portent le sceau de cette mutation ontologique sous-jacente. Désireux d'accueillir la réalité dans toute sa diversité, les romanciers aspirent à réaliser des sommes littéraires d'ampleur raisonnable. L'esthétique de ces récits propose en effet une ouverture ultime, sensible dans un mélange des genres qui ne laisse pas indemne les modèles et n'hésite pas à remettre en cause la nature trop artificielle des stéréotypes chevaleresques et courtois.
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