Dans la pratique philologique, la critique, qui établit l’authenticité du texte et l’herméneutique, qui en dégage le sens, sont deux opérations solidaires. Ce modèle s’est vu élevé à la réflexion, dès la fin du xviiie siècle en Allemagne, par les auteurs de la génération romantique, Friedrich Schlegel, Schleiermacher et Ast. Le projet de réunir "philologie et philosophie" résume leur tentative, originale par rapport aux philosophies postkantiennes. Car ces auteurs cherchent à penser l’antinomie entre la critique et l’herméneutique, la mise à distance dans le jugement et l’expérience d’une appartenance première. Suivant des perspectives distinctes, ils ont conçu une théorie philosophique de l’interprétation, depuis le cadre d’une encyclopédie philologique. Mais cette théorie ne s’est pas préparée à l’écart de tout exercice. Depuis la pratique philologique jusqu’à l’invention d’un nouvel art de la critique littéraire propre au premier romantisme d’Iéna, il s’agit toujours de l’autoréflexion d’une pratique interprétative, de l’effort fourni pour en énoncer les fondements et la portée. Le choix des textes retenus vise à mettre en évidence cette double perspective, en reconstituant ainsi l’arc allant du jugement critique singulier (sur la Lucinde ou le Philoctète) à la recomposition du sens de grands ensembles textuels (Boccace ou Lessing) et menant à la proposition d’une théorie cohérente. Entre le jugement critique et la relation herméneutique partant de la reconnaissance de l’historicité du sens, c’est le projet d’une encyclopédie des sciences de l’esprit qui cherche ici ses fondements théoriques.
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