Contre tout espoir
Souvenirs
Il est des noms qui évoquent immédiatement la résistance de l'esprit contre le terrorisme stalinien : ceux de Chalamov, de Soljenitsyne, de Pasternak et de Mandelstam.
C'est l'air de la liberté qu'on respire dans ce livre étouffant dont le manuscrit, rédigé sans doute en 1964, est parvenu clandestinement aux États-Unis sous le simple titre de « Souvenirs ».
Les souvenirs commencent en 1934, lors de la première arrestation d'Ossip Mandelstam, et évoquent ses trois années d'exil à Voronej. Ils s'achèvent avec la mort du poète, dans un wagon de déportation en Sibérie, un jour incertain de 1938. Mais, à l'intérieur de ce cadre, Nadejda Mandelstam, sans jamais parler d'elle-même, évoque de la façon la plus vivante toute une génération intellectuelle et politique, de Boukharine à Akhmatova, de Pasternak à Chklovski, ainsi que sa rapide réduction au silence dans les années 1920-1930.
À ce titre, cet ouvrage ne constitue pas seulement le commentaire le plus autorisé sur les années les plus dramatiques et les plus fécondes de celui qui est unanimement considéré comme le plus grand poète russe du XXe siècle, mais aussi un témoignage exceptionnel sur l'asphyxie de la culture russe du fait de l'accession au pouvoir de Staline. La sincérité de l'accent, sa simplicité tragique, sa dignité, son humour donnent son plein sens au prénom dont l'auteur avait fait sa devise : Nedejda signifie en russe « espérance ».
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