Confessions d'un bon à rien
La directrice du lycée de Beer Sheva eut ce jugement définitif sur le petit Elie : « Ah, celui-là, c'est un bon à rien ! Il faudra lui dénicher une institution à poigne, sinon ça finira mal pour lui... »
Le « bon à rien » a fait mentir la pythie du désert : il sera historien, essayiste, chroniqueur, journaliste, diplomate, professeur d'histoire de l'Occident moderne, intellectuel public et homme d'action.
Il est l'enfant des deux tragédies du XXe siècle : un père né en Bessarabie, officier dans l'Armée rouge et combattant sur le front de l'Est (Leningrad, Moscou, Stalingrad) puis emprisonné par la Securitate en Roumanie pour « cosmopolitisme » ; une mère qui a survécu à la déportation mais y a perdu deux enfants et sa santé mentale...
En 1961, son père reçoit enfin le « certificat de voyage » tant espéré. Une nouvelle vie commence : après un séjour d'un an dans un kibboutz au nord du Néguev, le jeune adolescent travaille pour payer ses études au collège français Saint-Joseph de Jaffa. Incorporé dans Tsahal comme parachutiste, il participe à la guerre des Six-Jours, puis, comme réserviste, à la première guerre du Liban.
À l'Université Hébraïque de Jérusalem, puis à Tel-Aviv, il se passionne pour la séquence qui va de la fin du Moyen Âge à la Révolution française et passe sa thèse de doctorat d'histoire à la Sorbonne. La France devient sa « seconde patrie intellectuelle et affective ».
Membre du comité central du parti travailliste israélien, il décline le poste de chef de cabinet de Shimon Peres et tourne ainsi le dos à une carrière politique prometteuse. Mais il sera nommé ambassadeur d'Israël en France en 2000.
Cofondateur du musée de l'Europe à Bruxelles, il sera « le plus israélien des Européens et le plus européen des Israéliens ».
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