Dans l'éternel tout est immuable. Le vide se fait champ doré. Les idées et la raison elles-mêmes deviennent conscience éternelle, vérité éternelle. Connaître l'éternel c'est connaître Dieu, dans les grandes et les petites choses, dans les actions infimes et dans celles des héros.
L'éternel nous parle. Il est partout. Parmi les feuilles d'un arbre. Dans le pollen d'une fleur. Au sommet d'une montagne. Dans les yeux d'une jeune fille. Dans un brin d'herbe. Dans la musique d'un mot.
Mon coeur est là. C'est le coeur d'un poète. Celui d'un photographe aussi. Coeur qui voit l'éternité ailée des choses, leur valeur éternelle, coeur qui met de côté le périssable et le fugitif, et se donne au temps qui demeure.
Le premier jour de l'univers Dieu s'écria : « Fiat lux », « Que la lumière soit ». Ce jour-là, il inventa la photographie, en devenant artiste lui-même, par amour de l'homme, de son oeil panoramique.
Il voulait lui offrir la connaissance, dans sa splendeur, celle de l'origine et du temps qui viendra, pour effacer la peur de la solitude.
Dieu donna aux citoyens de la terre, hommes et femmes, et même animaux, arbres, mers et océans, le noème de l'existence.
Photographie signifie : je suis là, j'ai existé et j'existe encore, pour l'éternité. Parce que la lumière ne mourra jamais. Elle est dans le vide du cosmos et dans notre regard, dans les yeux d'un chat et dans ceux d'un chien, dans les trous de l'écorce d'un arbre et sur le cercle de la lune et des étoiles.
Thierry Delaballe vient de loin, de très loin. Il a voyagé et voyage par les routes de l'Infini, dans le silence de son coeur, qui est silence d'étonnement et d'émerveillement, d'images vues et aimées, de clins sur la réalité, au bord de l'eau qui passe, lentement, comme la voix d'une feuille.
Le voilà se situer à la pointe d'un rocher, au centre du soleil, et attendre ce moment-éclair, où un point est l'univers et l'histoire tout entière. Thierry a le don de l'instant. Instant du sujet. Instant du coeur. Instant du centre. Instant de la pensée. Instant du songe.
Thierry n'affiche pas une culture photographique. Sa culture est dans son regard d'enfant, dans son visible oculaire, dans ses équivalences secrètes. Il ne réplique pas la réalité. Il la capte et la réinvente, pour nous faire rêver et réfléchir.
Ce n'est pas de la curiosité. C'est de l'art, et de l'angoisse illuminée. Thierry écrit - je dirais graphie - un reportage de sensations poétiques, face au passage du temps. Les phases de la vie deviennent des photogrammes par images-médium.
Sigmund Freud ne fait-il pas de même, à la recherche de notre moi ? Thierry trouve-il son moi, le mien et le nôtre ? Je pense que oui. Sa recherche s'adresse au mystère de la lumière, à la recomposition de notre identité.
Son appareil photographique n'est pas une machine, mais une prunelle au centre d'un visage, qui actionne le spectacle d'un monde devant lequel nous passons sans réfléchir, pris par la vitesse de la modernité. Mais ce n'est pas une dramatisation iconique. C'est la vie qui va, c'est du vérisme intérieur, la scénographie de la vision du théâtre des images.
De privée, l'image de Thierry se fait halo d'azur, plan volant d'un érotisme du regard. Il assimile les formes comme des mots clefs, et des perles traçant le sillage d'un décor sublime.
Le nunc et le hic de la photographie s'éloignent. Ce ne sont pas des reproductions, mais des productions, des flashs qui éloignent la copie. Thierry fait une transposition mentale, de sa posture de solitaire silencieux. Son art photographique est un laboratoire de poésie. Le de visu devient de corde, et de luce. La chambre noire est inondée de lumière. L'image n'est plus latente, mais vraie, dans sa vérité totale. Elle est là, elle est, comme moi-même.
Les photographies de Thierry Delaballe sont des révélations, et des fixages de rêve. Elles nous disent qu'il y a une issue, malgré la décomposition de la matière. Thierry est un voyant du mystère et des lignes profondes. Il est un poète de la photographie, de la durée, de la mémoire du monde. Pas de négatif, pas de cliché, mais la vie qui est là, pour être aimée, dans l'instantané de son regard.
Clic ! Et le temps de se donner, comme une rose, un arbre, un fil d'herbe, un rayon de la lune ou du soleil. J'ai l'impression que la forme visuelle se fait aussi sonore. Les photographies de Thierry parlent musique, celle de Wolfgang Mozart et de Maurice Ravel, et même de Gioac- chino Rossini. Des valeurs tonales partent, comme des notes douces, pour exprimer le langage universel de l'image.
Est-ce de l'imitation du vrai ? Non, c'est la vie dans sa plénitude de songe. Le cadrage s'ouvre au coeur. Thierry a fixé la mémoire, qui s'est docilement donnée à son appareil-miracle.
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