«En quelques instants l'été céda sa profusion à la nuit
diurne et froide, avancés sur la banquette, front contre le
pare-brise, nous regardâmes la coupole de ciel, le trou
maintenant boursouflé de viande épaisse, bouffie.
Alors, ce fut le déluge viscéral, une éventration de
grêle et de pluie, tout le canton crayeux pris au cou par la
tornade, secoué il en tomba des pierres. Aux tuiles crevées
s'emboucha la tempête, par le puits ouvert au dessus des
voitures cataracta la glace en débâcle, le toit de l'auto
résonnait dans un tintamarre de tambour géant, l'eau entra
par les portes mal jointes, par le moindre interstice
jaillirent à force des bras aqueux, en un clin d'oeil
l'habitacle fut investi par la trombe.
Et dans le peu de ciel qui demeurait l'orage plongea
ses couteaux, et la bête du ciel hurla rocailleuse, des
cailloux plein la gueule, il y eut du sang, du calcaire
craché ; et la bête au moment de mourir eut un ultime
soubresaut, rua d'un énorme fracas, d'une énorme lumière,
ah, donnant du corps, du muscle avant de baisser la tête et
de se renverser dans la fange.»
Dans une langue volontiers poétique aux accents
parfois baroques, Lionel-Edouard Martin entrelace des
mythes en toile de fond de ce récit. Il y a un vieil homme
qui annonce les décès de la commune. Il y a le
cheminement de deux adolescents dans leur propre
obscurité et dans le noir de caves surplombées de grands
arbres. Il y a «la poussée du désir, l'éventrement des terres
creuses, la brûlure du serpent conjurée par la lumière». Il
y a tout un réseau d'oppositions appelées à muer, à se
fondre en une synthèse dont un orage d'été constituera
l'ultime catalyseur.
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