« Chez Guillaume Durand, ce soir-là, il y avait un écrivain voyageur, les poches débordant de goémon. Un nouveau philosophe de centre gauche qui venait de passer au centre droit et avait écrit, en quatre cent quatre-vingt-douze pages, pourquoi. Un linguiste tchèque. Une habituée des gros tirages. Un journaliste du Figaro qui voyait partout le déclin de la virilité et pleurait abondamment à l'évocation de Lino Ventura. Une écrivaine attaquant en un ouvrage au vitriol une consoeur qui l'aurait scandaleusement plagiée. Un journaliste politique avec la raie à droite qui venait d'écrire la biographie d'un célèbre patron du CAC 40. Ainsi qu'un écrivain sédentaire à succès. Et Benjamin Bin. »
Ironie caustique et portraits à la paille de fer
Cinq fables modernes et cruelles... Benjamin Bin a-t-il eu raison de modifier l'essentiel de son livre sous la pression du service marketing de l'éditeur ? Deux frères découvrent leur mystérieux géniteur, tandis qu'un boucher mélancolique peint des côtelettes sur fond de soleil couchant. Zaza, la serveuse au coeur tendre, n'aurait pas dû rencontrer Gérard LePilon, le représentant entreprenant. Bijou, le candidat du Grand Parti Social, arrachera-t-il la mairie de Souche à ses adversaires alors que rôdent les escargots ? Et Pauvre Zip (papa n'aimant que les moteurs surpuissants et maman ayant une calculette greffée sur le cerveau gauche) trouvera-t-il une oreille attentive dans ce monde sans pitié ?
L'Ange du Bizarre...
Hommage à la nouvelle d'Edgar Poe, dont le narrateur est confronté à l'apparition d'un être fantasque et déplaisant, cette collection vous fera découvrir, vaillant lecteur, des textes insolites, en marge d'une littérature officielle souvent convenue. Êtes-vous prêt à l'aventure ?
Pierre Laurendeau
« Le brigand se pencha à travers la table, et, m'ajustant un coup sur le front avec le goulot d'une de ses longues bouteilles, me renvoya dans le fond du fauteuil, d'où je m'étais à moitié soulevé. J'étais absolument étourdi, et, pendant un moment, je ne sus quel parti prendre. Lui, cependant, continuait son discours :
« Phus phoyez, - dit-il, - gue le mié hait de phus dénir dranguile ; et maindenant phus zaurez gui che zuis. Recartez-moâ ! che zuis l'Anche ti Bizarre.
- Assez bizarre, en effet, - me hasardai-je à répliquer ; - mais je m'étais toujours figuré qu'un ange devait avoir des ailes.
- Tes elles ! - s'écria-t-il grandement courroucé. - Gu'ai-che avaire t'elles ? Me brenez-phus bur ein boulet ? »
Edgar Allan Poe, L'Ange du Bizarre, 1844
(trad. Charles Baudelaire)
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