Témoins, ceux qui ont reçu et entretenu en eux l'impact Alain. Ils sont, à proximité diverse, des familiers. Quand ils parlent de l'oeuvre ou de son auteur, ils ne tardent pas à signifier un choix qui leur demeure essentiel. Toujours singulier ce choix fait connivence, non confidence, et moins encore prosélytisme. Rien à voir avec l'élection du Maître, à quoi le disciple s'attache. On parlera plutôt d'une farouche fidélité à la libre figure que prend la maîtrise de l'esprit dans un penseur si volontiers homme.
Maurice Savin fut bien autre chose qu'un témoin. Alain fut l'accident essentiel de sa vie, ce qui est sans doute le fait par excellence de la filiation spirituelle. Mélange de hasard, d'élection et de différence. Maurice Savin savait ce que c'est qu'un maître, parce qu'il avait pour toujours un Maître qui avait eu un Maître. Il y établit son indépendance dans la filiation, comme Emile Chartier l'avait fait avec Lagneau. Maurice Savin aimait Alain et jugeait en Emile Chartier tout ce qu'Alain avait su surmonter de lui-même. Au reste, il s'établit dans sa différence, parce qu'il ne songeait pas à imiter, qui que ce fût.
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