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"Dans un quartier délaissé de Milan, un quartier sans débouchés devenu une place forte de la drogue, Rocco, vingt ans, est chargé par la mafia de revendre de la coke, de menacer, de tuer… Un travail rentable et valorisant aux yeux des jeunes de son entourage. Seulement, le jour où son meilleur ami est froidement assassiné par ceux là mêmes pour qui il travaille, il change de camp pour devenir le repenti qui crie vengeance et justice. C’est ainsi que le procès de la mafia se met en route, un procès qui pourrait enrayer les rouages bien huilés du trafic mondial de la drogue et du crime organisé. Mais c’est compter sans la collusion entre pouvoir et mafia… Par cette plongée subjective qui donne la parole à un repenti, Fabrizio Gatti s’attaque à une question plus que jamais d’actualité, celle de la mafia italienne devenue un acteur majeur de la criminalité internationale. Entretien avec Fabrizio Gatti Quel a été le point de départ de ce livre? Une histoire que j’ai vécue, tout simplement. Les noms de certains protagonistes ont été modifiés pour préserver leur vie privée, leur sécurité. Mais surtout parce que ce qui importe, ce n’est pas comment nous nous appelons mais ce que nous sommes et avons été. Pourquoi avoir choisi la forme romanesque? C’était un choix délibéré. Je voulais raconter ce que j’avais vu avec les yeux du citoyen plus que du journaliste, pour faire partager mon émotion et éclairer le parcours de ces hommes et ces femmes dont la vie s’est trouvée inextricablement mêlée à la criminalité organisée. Il s’agissait de donner un tableau de la réalité italienne vivant et tangible. Ce livre a d’ailleurs été adapté au théâtre. Combien de morts peut-on attribuer à la mafia en Italie? Il n’y a pas de recensement précis. Il n’existe aucun lieu public consacré aux victimes de la mafia sicilienne. Ni de la ’ndrangheta calabraise. Ni de la camorra campanienne. L’association portant le nom de Peppino Impastato – le journaliste sicilien assassiné par Cosa nostra le 9 mai 1978, à l’âge de trente ans – répertorie 500 noms de personnes tuées entre 1945 et 1993. Un registre d’état civil de la défaite. Seules les victimes innocentes sont recensées. Pas celles des règlements de comptes entre mafieux. En incluant les guerres entre clans, les estimations s’élèvent à pas moins de 2 500 morts en Sicile. Malgré le procès que vous racontez dans votre livre, la mafia a encore un grand pouvoir en Italie Aujourd’hui encore, au Parlement italien, siège un sénateur très proche de la mafia. Et soixante milliards d’argent public partent en fumée chaque année à cause de la corruption. Avec 218 milliards de chiffre d’affaires et 10,9 % du produit intérieur brut, la mafia italienne constitue une véritable économie parallèle. Mais la mafia frappe aussi dans le reste du monde… Oui, la ’ndrangheta a créé des antennes en Allemagne, en Espagne, au Portugal et en Australie. La camorra s’est implantée dans le sud des États-Unis, en France, en Espagne, en Angleterre, en Écosse, au Venezuela. La mafia est devenue tellement raffinée qu’en Italie, après avoir endossé le costume trois-pièces de la politique, elle est allée se camoufler dans le monde de l’entreprise, des banques et de la finance. Ses compagnies amies, on les trouve désormais partout. D’ailleurs, au mois de février 2014, un agent infiltré a permis à la police italienne et au FBI de démanteler un groupe criminel, lié à la ’ndrangheta, qui avait établi un réseau de trafic de drogues et de blanchiment d’argent entre les États-Unis et l’Italie. Leur présence n’est une surprise que pour ceux qui refusent la réalité. "