A l’époque dont nous parlons, le chemin du fer entre Marseille et Gap, marqué de petits points sur les cartes routières, n’existait pourtant qu’en projet. La vallée de la Durance ne voyait pas, quatre fois par jour et la durée d’une seconde à chaque fois, les deux trains montants et les deux descendants jeter sur ses champs et ses roches, plus silencieux, plus solitaires après cela, le bruit d’un tourbillon et l’ombre d’une fumée. Mais, en revanche, la route nationale, maintenant déserte, résonnait dès le matin sous les équipages des rouliers, ce n’étaient que jurons et claquements de fouets, longs attelages de mulets portant le filet frangé, en ficelle blanche, et le collier à la provençale, cornu, pointu, revêtu de peau de chien teinte en bleu, égayé de nombreux grelots et de deux anneaux de verre où passent les guides ; ce n’étaient que carrioles haut chargées, roulant et tanguant comme un vaisseau à trois ponts, avec le brancan plus petit qui suit dans un sillage de poussière ; et tous les soirs, aux auberges échelonnées : la Bégude, la Mounine, les Trois Rois, d’interminables repas à pleines tablées faisaient courir les servantes et flamber les fourneaux.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.
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