Le Bauhaus fut une institution créative et pourtant irrésolue.
Bien des disputes ont jalonné son histoire. S'il fut fermé
d'autorité en 1933 par les nazis à peine arrivés au pouvoir,
c'est sans doute parce que ce pouvoir ne pouvait supporter
son principe de tension incessante. Pareil événement n'est
pas seulement de circonstance. Il s'est produit dans un champ
de possibilités. Que le politique ait pu se déchaîner et que
dans ce déchaînement même il n'ait pas admis que soient
discutées des questions qui, le plus souvent sous une allure
artistique, touchaient en définitive aux valeurs, portées et
méthodes du faire ou du produire en général, voilà sur quoi
il faut encore réfléchir. Il nous reste à déconstruire, c'est-à-dire
à rendre à sa complexité, voire à son ambiguïté
philosophique toute une mécanique de notions dont la logique
efficace est fort capable de nous échapper réellement.
Parmi ces notions, celle d'industrie dont le présent essai,
réédition notablement augmentée et revue d'un ouvrage paru
en 1999, montre, en s'appuyant sur une lecture de Rousseau,
qu'elle a elle-même excédé certaines de ses limites historiques.
Les interrogations portées par le Bauhaus dans ses divers
champs d'activité ne se sont pas développées dans une société
simplement industrielle, mais dans une monde touché depuis
quelques décennies par une révolution dans l'industrie. Ce
sont les échos et les ondes de choc de cette révolution qu'il y
a lieu, encore, d'entendre et de lire dans les textes de divers
artistes ayant travaillé sur place (Gropius, Kandinsky, Klee,
Mies van der Rohe, Moholy-Nagy, Schlemmer) ou dans ceux
de proches comme Schönberg.
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