Voici enfin publiée intégralement – les seules lettres de Régnier l’avaient été il y a vingt-cinq ans – l’importante correspondance d’André Gide avec celui qui fut d’abord pour lui un poète admiré (son aîné de cinq ans) et un ami très proche avec lequel il fit son premier vrai voyage (à travers la Bretagne, en 1892). Pendant plus de dix ans, leurs lettres font revivre toute cette fin-de-siècle littéraire riche et bouillonnante de productions originales. Pierre Louÿs et le milieu Heredia (Régnier et Louÿs furent les gendres du poète des Trophées), Paul Valéry, Froncis Jammes... sont parmi les acteurs de cette chronique. Mais Gide, en 1900, eut le bon goût de ne guère aimer le roman un peu trop « polisson » de Régnier, La Double Maîtresse : blessé, le susceptible auteur ne devait jamais lui pardonner cette critique, et se déroba toujours à une réconciliation, que Gide souhaitait pourtant. Leurs relations s’espacèrent, dans une progressive glaciation ; un dernier échange épistolaire en 1911 ne fut suivi, de la part de Régnier, que par des témoignages d’hostilité rancunière vis-à-vis de son ancien ami, devenu à ses yeux « un médiocre prosateur à la médiocrité prétentieuse »,— Gide demeurant, lui, fidèle à son admiration de jeunesse et faisant une belle place aux vers de Régnier dans son Anthologie de la poésie française de la Pléiade.
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