La vie d'un ouvrier vaut-elle moins que celle d'un étudiant du cinquième arrondissement de Paris ? Voici la question qui pourrait résumer les problèmes posés par l'amiante depuis le milieu des années 1970. Aujourd'hui, analystes et commentateurs s'accordent à définir l'amiante comme un scandale de santé publique. Pourtant, un regard rétrospectif montre que dix ou quinze ans auparavant les mêmes acteurs s'accommodaient assez bien d'un problème perçu comme relevant principalement du domaine professionnel. Cette acceptation est d'ailleurs toujours pleinement d'actualité vis-à -vis de l'ensemble des autres cancers professionnels. Cet ouvrage montre que c'est lorsque le risque lié à l'amiante a été redéfini comme un risque environnemental menaçant l'ensemble de la population que l'intérêt à son égard a pu être considérablement élargi. Il décrypte les mécanismes et raisons de ce processus, en expliquant pourquoi les cancers liés à l'amiante n'auraient pas pu être constitués en problème majeur de santé publique s'ils étaient restés principalement définis comme des cancers professionnels. Au-delà des interrogations sur le cas même de l'amiante, ce livre fournit des clés d'analyse originales pour comprendre les processus de publicisation des problèmes. En proposant une sociologie des problèmes publics, il invite à réexaminer certains lieux communs des débats relatifs à la médiatisation ou à l'espace public, notamment ceux liés au « pouvoir » des journalistes et des médias ou à la place des victimes dans l'espace public, en replaçant ces questions dans une perspective de sociologie politique du pouvoir et de la domination.
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