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Est-il encore nécessaire et utile de parler d’Alexandre le Grand — dira-t-on peut-être —, alors même que le rythme et l’ampleur des publications qui lui sont consacrées paraissent incontrôlables ?
André Aymard, l’un des plus perspicaces parmi les historiens de l’Antiquité, eut en 1953 une formule lapidaire : "Alexandre ne manque pas d’historiens, et ceux-ci ne manquent pas d’Alexandres." Le moment est venu, non pas tant de faire un bilan des connaissances que de proposer une réflexion sur les manières variées et contradictoires selon lesquelles, au cours des siècles, de l’Islande à Java, ont été échafaudées, contestées, déconstruites et reconstruites les images et interprétations sur lesquelles les historiens continuent de se disputer et leurs lecteurs de rêver.
On ne sera donc pas désarçonné de voir fleurir, dans cette analyse critique des lieux communs et de leurs usages selon les époques, des entrées telles que "Croisade", "Mission civilisatrice", "Sikandar", "Maison de Bourgogne" ou "Chute de Constantinople", "Heavy Metal", "Mali", "Maudit Aliksandar" ou encore "Napoléon". Chacune traite de la mémoire d’Alexandre et de ses différentes strates, manifestations et instrumentalisations au cours des siècles, d’Est en Ouest et du Couchant au Levant.