En Afghanistan, l'opium a financé les guerres au cours des trois dernières
décennies. L'opium sera-t-il un obstacle à la paix ou y contribuera-t-il ?
La réussite de la reconstruction du pays dépend d'un défi économique et
politique unique. L'économie de la drogue représente, en effet, environ 60 %
du PIB - chiffre qui n'a été égalé par aucun autre pays, pas même par la
Colombie, premier producteur mondial de cocaïne, dont la part n'excéda
jamais les 7 %. La situation inédite de l'Afghanistan invite donc à s'interroger
non seulement sur le rôle que la production et le commerce de l'opium
jouent dans une économie de post-conflit dévastée, mais aussi sur l'influence
qu'ils peuvent avoir dans le processus complexe de reconstruction de l'État.
Plusieurs responsables de gouvernements occidentaux et d'organisations
internationales s'accordent à dire qu'il ne faut pas négliger le risque réel que
l'Afghanistan, premier producteur mondial d'opiacés depuis une dizaine
d'années, devienne un «narco-État». D'autres observateurs estiment que
cette situation n'a pas que des effets négatifs, du moins à court terme. Dans la
mesure où les campagnes anti-drogue se révéleraient efficaces, une baisse
très sensible de cette ressource ne risquerait-elle pas de déstabiliser le pays ?
Le président Hamid Karzaï s'est engagé devant la communauté internationale
à lutter contre la culture du pavot, mais le niveau de la production reste
très élevé.
Alain Labrousse revient sur l'histoire récente de la production d'opium, à
laquelle prirent part les seigneurs de guerre et les taliban - aujourd'hui
acteurs sur le nouvel échiquier politique - pour mieux éclairer les enjeux
tant nationaux qu'internationaux devant lesquels le pays est placé. Car, pour
de nombreux pays occidentaux, la «guerre à la drogue» est une justification
supplémentaire pour intervenir en Afghanistan.
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