En 1926, Paul Nizan, alors jeune agrégé de philosophie, quitte l’École Normale Supérieure pour aller occuper un poste de précepteur à Aden (Yémen). Son voyage, pense-t-il, lui permettra de se soustraire à l’étouffement ressenti dans le petit monde universitaire et intellectuel du Ve arrondissement de Paris. Il retrouve toutefois à Aden l’Europe qu’il espérait quitter, condensée dans une société coloniale dont il dénonce la sclérose et le scandale dans "Aden Arabie", publié en 1931. Dès l’incipit de ce récit autobiographique, le cri est jeté: «J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie.» Il raconte ses désillusions, dénonçant l’inauthenticité de l’existence confortable, l’illusion de l’exotisme et les multiples aliénations de l’exploitation capitaliste des colonies. Le pamphlet a pour cible principale «Homo economicus», l’«animal content de son économie du profit supplémentaire». Itinéraire spirituel, livre d’éducation politique mais aussi cri de révolte contre la trahison des clercs, "Aden Arabie" connaîtra un long purgatoire en raison de l’exigence éthique qu’elle porte et de la violence de la révolte qu’elle exprime. Le livre sera redécouvert en 1960 par Jean-Paul Sartre qui écrit à son propos: «Nizan, c’était un trouble-fête. Il appelait aux armes, à la haine, classe contre classe; avec un ennemi patient et mortel, il n’y a pas d’accompagnements; tuer ou se faire tuer: pas de milieu.»
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