Contrairement à une idée reçue et à un récit lénifiant, il n'y a pas eu d'immaculée conception ni d'âge d'or de la République en France. Non seulement il a fallu presque un siècle pour que celle-ci, après la Révolution et la Première République (1792), s'établisse dans la durée avec les lois de 1875 mais, dès ses débuts sous la troisième République, elle fut l'objet non d'un consensus mou mais d'affrontements portant sur ses principes mêmes.
Dès l'origine, deux conceptions se sont vivement opposées, l'une, minoritaire, autour des radicaux, du groupe parlementaire de l'Extrême gauche, de Louis Blanc et du jeune Clemenceau, l'autre qui triomphera autour de Gambetta, de Ferry, de ceux qui se nommèrent eux-mêmes les « opportunistes ». Bien qu'elle fasse écho à de nombreux débats qui traversent et structurent la vie politique française depuis plus d'un siècle, et qu'elle trouve encore aujourd'hui un regain d'actualité, cette opposition a été en partie passée sous silence, refoulée, biffée de notre histoire.
C'est le mérite de l'ouvrage de Daniel Mollenhauer, À la recherche de la « vraie République » - publié en 1998 sous le titre Auf der Suche nach der "wahren Republik". Die französischen "radicaux" in der frühen Dritten Republik (1870-1890) -, de restituer en profondeur, à partir d'un travail rigoureux sur les sources, ce débat, et cela en suivant le fil conducteur de la question démocratique, celle de l'organisation des pouvoirs, mais aussi celle, inséparable, de la justice sociale.
Pour finir, cet ouvrage passionnant montre aussi comment, face aux dangers de l'extrémisme et du populisme, les radicaux durent céder sur la plupart de leurs ambitions après la crise du boulangisme. En nous proposant un moment fondateur trop méconnu de notre histoire, ce livre éclaire d'une nouvelle lumière bien des débats politiques brûlants de notre actualité.
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